Banderoles, ballons, musique et collation. Quand Hye Sung avait rejoint le parc après avoir profité d'une longue douche chaude, le jeune homme avait peiné à en croire ses yeux. Il reconnaissait l'endroit, bien sûr, pour s'y être rendu plusieurs fois depuis sont arrivée sur l'île. Pourtant, le coin n'avait plus rien de comparable avec l'habituel lieu déserté... Puisque à l'heure actuelle, chaque participant – ou tout du moins, une bonne majorité – avait rejoint le dit parc pour profiter d'un armistice à l'occasion de la fête nationale.

Autant dire que Hye Sung ne pensait pas grand-chose de tout ceci... Et à vrai dire, même s'il avait voulu se lancer dans un de ses discours de politique de comptoir, il n'avait pas la tête à ça. Ayant d'ores et déjà trouvé une bonne hygiène, il n'avait plus qu'une idée en tête : profiter du repas qui leur était offert. Et autant qu'on se le dise : le menu avait beau être simple, il avait pourtant l'impression que ce déjeuner était le meilleur qu'il ait mangé de sa vie.

L'étudiant n'en avait pas laissé une seule miette. Un peu à regret, songeant qu'il aurait au moins pu conserver la pomme pour plus tard... Mais soit : au moins était-il pleinement rassasié, et satisfait à l'idée d'avoir pu déguster autre chose que de la poiscaille ou de maigres racines. Mains posées sur le ventre, Hye Sung reste longuement assis, savourant cette sensation de lourdeur qui n'est pourtant pas désagréable.

Parcourant les environs des yeux, le jeune homme se trouve détendu à voir que personne ne tentait quoi que ce soit pour porter atteinte à ce moment de paix bien mérité. Ceux qui trouvaient cette occasion un peu tordues devaient être nombreux – il en faisait lui-même partie, ne portant pas le NEC dans son cœur – mais au moins, tout un chacun semblait soulagé de ces heures de répit, pas assez ingrats pour cracher dans la soupe. Il tente au passage de relever quelques visages connues... Vainement. Un petit soupir s'échappe de ses lèvres à ce constat : c'était bien beau d'être en paix, ça aurait tout de même été mieux d'avoir un peu de compagnie pour passer le temps.

Une annonce interrompt la musique diffusée par les haut-parleurs. L'organisation laissait savoir que certains participants avaient reçu du courrier, et qu'ils pouvaient d'ores et déjà aller le chercher auprès d'un responsable. Hye Sung reste immobile un instant après la fin de l'annonce, yeux rivés sur la personne en charge des dîtes lettres. Est-ce que sa famille lui aurait envoyé un petit quelque chose ? Un peu hésitant, il se lève, venant néanmoins se mettre dans la file d'attente. Forcément, il espérait avoir une lettre, une photo, n'importe quoi... Mais forcément, la crainte de ne rien recevoir ne pouvait que pointer le bout de son nez.

Parmi les participants, son regard se pose sur un jeune homme, lui aussi en train de patienter dans la file. De taille moyenne, mince, le visage délicat. Une personne qui inspire une sorte de candeur à Hye Sung, qui juge de fait qu'il ne devait pas être là depuis très longtemps. L'inconnu a la main resserrée sur une chaîne au bout de laquelle il devine une croix. Le devinant un peu stressé par l'attente, l'étudiant lui offre un sourire qui se veut réconfortant. Et bon... Puisqu'ils avaient encore un peu de temps avant que ça soit à leur tour de récupérer leur courrier, Hye Sung s'essayer à lancer la conversation pour que l'attente soit moins pénible. « Tu pries pour avoir reçu quelque chose ? » commence t-il, détendu. Et ce, même s'il n'en menait pas plus large que l'inconnu. « Dis-moi si j'me trompe, mais t'es pas là depuis longtemps, si ? » Et puisqu'en fait, il avait quand même zappé la base : « Moi c'est Hye Sung. »

Amené de force le premier octobre sur une île qui appartenait au diable, Gabriel avait survécupendant dix jours, ou peut-être plus. Quel jour sommes-nous ? Le treize octobre, jour de paix. Déjà treize jours ? Impossible il avait du avoir des trous de mémoires pour que le temps passe si vite. Il en savait la cause, bien que croyant il savait qu'il n'était pas possédé par le diable mais bel et bien maladie. Une maladie rare qui touche très peu de personne, il fallut que cela lui arrive à lui. Il ne connaissait pas cette autre personne qui prenait le contrôle de son corps, il savait simplement son nom : Lucifer. Chaque fois que ce dernier sortait de son sommeil, Gabriel ne se souvenait de rien, comme s'il avait dormir durant toute la période où Lucifer s'amusait avec son corps frêle. C'est en parti grâce à cette personnalité que le croyant avait pu survivre jusqu'à maintenant mais il l'ignorait, il croyait que cela était dû à sa foi, que le seigneur ne l'avait pas abandonné après toutes ces prières. Il trouvai toujours de quoi manger, des endroits où se cacher à croire que le seigneur voulait le faire revenir sain et sauf chez lui. Encore un signe de Dieu ? Cette paix temporaire ne pouvait faire que du bien au jeune homme, il s'était levé aux aurores comme d'habitude pour profiter de ce jour où personne ne s'entretuerait. Il remerciait Dieu pour la douche chaude et le bon repas, il avait profité de tout cela, il avait repris des couleur et repris le peu d'humanité qu'il avait perdu depuis son arrivée sur cette maudite île du diable. Et comme il était un fervant croyant il n'oubliait pas l'heure de la prière.

Il s'apprétait à prier lorsque les hauts parleurs le sortirent de ses pensées. Du courrier pour les étudiants, il espérait que ses parents lui aient envoyé un petit mot. Mais il savait que cela serait trop beau pour être vrai, ses parents l'aimaient énormément et pour cause il était leur unique enfants, ils avaient eu du mal à l'avoir alors il était chouchouté mais tout avait basculé à cause de sa maladie. La mère devenait de plus en plus folle et le père était occupé à calmer les crises de la femme. Pourtant il espérait recevoir un petit « nous t'aimons, mon fils » ou quelque chose comme cela. Et même si ce n'était pas une lettre de sa famille, au moins une de quelqu'un pour prouver qu'il n'a pas été oublié durant son absence même si cela ne faisait pas longtemps qu'il était ici. Il s'était installé dans la file d'attente, serrant son pendentif en forme de croix entre sa main. Ses yeux se fermèrent alors qu'il chuchotait quelques mots, une prière implorant le seigneur d'une lettre ou d'un signe de ses proches. Un miracle. Il n'attendait peut-être pas une lettre de ses parents, mais le prêtre de l'église l'appréciait alors pourquoi pas une lettre d'encouragement de sa part ? Ou une des bonnes sœurs de l'établissement scolaire qu'il fréquentait. Il demandait juste une pauvre lettre de rien du tout.

Gabriel avait finalement ouvert les yeux à nouveau, il serrait toujours sa croix mais cette fois entre ses deux mains. Il regardait les participants attendre aussi impatiemment une lettre, très peu ne se souciaient pas de cette distribution du courrier, et d'ailleurs Gabriel ne comprennait pas vraiment pourquoi. Un jeune homme lui souriait, c'était le seul à avoir posé un regard normal sur sa personne. Même si l'asiatique restait inquiet et omnubilé par sa prière il rendit le sourire à la personne qui semblait bien plus maigre que lui. Il devait être là depuis plus longtemps que lui pour être d'une telle maigreur. Le voilà qui engageait la conversation, il semblait bien sympathique alors Gabriel ne pouvait pas refuser un peu de compagnie pour le moment.

« Je sais que je n'aurais peut-être rien mais je prie quand même, j'espère recevoir quelque chose mais on m'a bien accordé la vie jusque là alors si je n'ai rien c'est pas si grave. » Répondit-il au dénommé Hye Sung. « Je suis là depuis le premier octobre, et toi ? Depuis plus longtemps je pense... Oh, je m'appelle Gabriel. Est-ce que... Tu penses avoir une lettre toi ? »

Il avait sourit, depuis quand n'avait-il pas sourit sur cette malheureuse île ? Il n'avait pas toujours fait de bonne rencontres après tout la trois quart voulaient survivre et n'hésiteraient pas à abattre de sang froid. La file d'attente pour recevoir les lettres diminuait rapidement, ceux qui en avaient s'extasiaient et pleuraient même. Dans quelques minutes, voir seconde, il saurait si lui aurait eu un petit quelque chose. Il espérait toujours, il priait encore mais il savait au fond de lui qu'il n'aurait rien.

L'inconnu rend son sourire à Hye Sung, et ne semble pas rechigner à un peu de conversation en attendant que leur tour ne vienne. Le surprenant les mains resserrées sur une chaîne au bout de laquelle pendouille un petit pendentif en forme de croix, l'étudiant ne tard pas à interroger. Depuis son arrivée ici, il n'avait jamais vu qui que ce soit en train de prier. Ou tout du moins, si certains le faisaient, ce n'était pas de façon aussi visible. Mais forcément, il se doutait que plus d'un joueur avait du implorer Dieu pour un jour pouvoir rentrer sur le continent. Quoi qu'il en soit, l'inconnu explique qu'il savait qu'il n'aurait probablement rien, mais que ça n'empêchait en rien de laisser un petit espoir perdurer. Il ajoute aussitôt qu'après tout, ça n'était pas un drame s'il ne recevait rien : on lui avait laissé la vie sauve jusqu'à là.

Peu habitué aux discours du genre, Hye Sung sourcille un peu, ayant un peu de mal à approuver tout ça. Mais bon, ce garçon semblait avoir sa foi, et ce n'était pas lui qui allait chercher à l'attaquer ici. Surtout pas ici, et encore moins en ce jour de paix où il n'était pas d'humeur à se prendre la tête. « Je vois. C'est... Sage, je suppose, comme point de vue. » Pas sûr que ce terme soit celui qui colle le plus à la chose... Mais pour l'heure, Hye Sung était encore tout étonné des paroles de l'inconnu.

Inconnu qui se présente sous le nom de Gabriel, d'ailleurs. Il explique qu'il était arrivé le premier octobre, avant de retourner la question à son vis-à-vis. « Je suis arrivé par la première vague, le 15 mai. » répond simplement ce dernier. Gabriel lui demande alors s'il pensait recevoir quelque chose, pour sa part. « Je pense. Enfin, j'espère quoi ! Ça me ferait quand même de la peine si ma famille n'avait pas pensé à moi. Mais on n'est jamais à l’abri d'une perte de lettre ou un truc comme ça. » Il fallait y penser, aussi. Mais pour l'heure, plus leurs tours avançaient et plus Hye Sung était anxieux de ne rien recevoir. Et si ses sœurs et sa mère s'en fichaient ? Il savait que c'était complètement irrationnel comme vision des choses. Mais pas tout à fait incompréhensible, et même assez légitime. Quoi qu'il en soit, il ajoute quelques mots à l'attention de son vis-à-vis : « Tu ne sembles pas très optimiste à ce sujet toi, hein ? » Sur ces mots, il lui adresse un petit sourire réconfortant, histoire de faire comprendre qu'il n'y avait pas de raison pour qu'on ne l'ait oublié. « C'était comment ta vie, avant ? T'étais d'où ? T'avais des frères et sœurs ? » poursuit-il, histoire de détendre l'atmosphère un peu trop chargée d'anxiété.

Le temps qu'ils n'échangent ces quelques mots pour se connaître un peu mieux, leurs tours viennent. Hye Sung s'avance en premier vers le préposé au courrier, lui donnant son nom complet. Les quelques secondes qui suivent se font affreusement longues... Mais quand finalement, l'homme en face de lui vient rayer un nom sur une liste posée sur son calepin, l'étudiant lâche un long soupir : on ne l'avait pas oublié. Sa famille avait pensé à lui en cette occasion. Une enveloppe lui est tendue. Il remercie, s'écarte de quelques pas pour laisser Gabriel passer à son tour. En attendant, son regard se pose sur la surface lisse et blanche de l'enveloppe... Et il ne reconnaît ni l'écriture d'une de ses sœurs, ni celle de sa mère. Mais celle d'un de ses meilleurs amis de la fac. Il retourne, voulant regarder l'expéditeur. Une bonne liste de noms, d'amis plus proches les uns que les autres. Un large sourire sincère et touché vient fendre les lèvres du jeune homme, qui n'ouvre pas immédiatement l'enveloppe, les yeux encore rivés sur chacun des patronymes y figurant. Et alors qu'il perçoit qu'on s'approche de lui, il finit par en détacher son attention, pour reconnaître Gabriel. Sourire toujours pendu aux lèvres, il lui demande : « Alors ? T'as reçu un truc ? »

On disait souvent à Gabriel que prier ne servait à rien dans ce genre de monde, que Dieu n'existait pas donc cela serait du temps perdu de prier un créateur invisible. Ces personnes sont idiotes car pour elles, il n'y a que ce qui peut être vu qui existe mais la plupart de ces athées croient aussi à l'existence d'une vie extraterrestre, ils croient aux esprits mais aucun en Dieu. Gabriel y croyait et pas seulement parce qu'il a été élevé comme un bon chrétien non, mais parce qu'il était toujours en vie, il ne pouvait pas tuer il en était impossible hors dans cette île maudite il fallait le faire pour survivre alors que lui avait réussi dans prendre la vie d'un innocent. Il devait remercier Dieu pour ce cadeau qu'est la vie, si lui n'avait tué personne il ne pouvait pas en être sûr de cette chose qui sortait lorsqu'il le voulait, cet être des enfers, mais le jeune homme préférait croire qu'il ne faisait rien de mal à part se cacher et prier que personne ne le découvre. Cette journée de cesser le feu était un message de Dieu, il ne pouvait le croire autrement, il avait entendu ses prières alors il n'attend pas forcément une lettre de sa famille. Il était déjà bien heureux d'être encore en vie. Il avait commencé à discuter avec un jeune étudiant, lui aussi semblait attendre une lettre, il semblait espérer que sa famille ait pensée à lui. Il ne semblait pas bien méchant, pas du genre à attaquer quelqu'un sans raison apparente. Il y avait encore quelques personnes censées sur cette île du diable.

Hye Sung était donc arrivé sur l'île en mai, il avait dû avoir beaucoup de chance pour avoir survécu jusque là, lui aussi devait avoir eu l'aide du ciel qu'importe qu'il prie ou non. Six moi, déjà six moi, oui il avait une chance fulgurante, que mangeait-il depuis tout ce temps ? Gabriel n'était arrivé que depuis treize jours et il peinait déjà à trouver de la nourriture comestible. Gabriel avait aussi pleins de questions à poser au jeune homme mais ce dernier posait les siennes avant. Oui Gabriel était un éternel optimiste, il voyait le mal comme tout le monde mais il préférait voir le bon côté des choses, il savait qu'il rentrerait chez lui, il ne mourrait pas ici ou si c'était le cas... non il ne préférait pas y penser, c'était absurde comme idée, il était bien trop optimiste pour pouvoir penser sa mort.

« Je suis fils unique parce que ma mère n'avait jamais pu avoir d'enfant et moi je suis arrivé comme par miracle, je ne suis pas non plus adopté. Je suis dans une école catholique et c'est tout, enfin je crois. Et toi tu avais des frères et sœurs ? Qu'est-ce que tu mangeais depuis que tu es arrivé ici ? » Demandait-il par curiosité.

Le temps passait lentement, et finalement ce fut au tour de Hye Sung d'aller chercher son courrier, il en avait bien eu, il semblait heureux de voir qu'on ne l'avait pas oublié. Gabriel resserrait un peu plus ses doigts autour de sa croix, il priait intensément, il savait pourtant que personne n'aurait eu le temps de lui envoyer une lettre, pas à lui l'enfant maudit possédé par le diable. Oh oui, oui on l'appelait ainsi, les chrétiens l'appelaient ainsi, lui savait pertinemment qu'il était simplement malade qu'une autre personnalité s'était développée, était devenue autonome, ah qui voudrait envoyer une lettre à un jeune homme comme cela. Personne. Pourtant il osait encore espérer et prier, il était optimiste le jeune homme. Lorsque ce fut son tour, il donna donc nom complet à l'homme qui regardait toutes ses feuilles et lui affirma qu'aucune lettre n'était arrivée pour lui. Il le savait, c'était prévisible, il avait tout de même un petit pincement au cœur, mais il gardait le sourire. Sa mère était dans un sale état, son père trop occupé, il n'avait pas beaucoup d'amis, et le prêtre n'avait sûrement pas que cela à faire. Qu'importe il souriait en rejoignant le jeune homme avec qui il faisait connaissance. Ce dernier lui posait la fameuse question et pourtant il ne perdait pas son sourire en lui répondant :

« Je n'ai rien eu, je le savais mais ce n'est pas grave. Et toi ? Oh, on a pensé à toi tu dois être heureux. »

Deux mondes complètement différents. Intérieurement, Hye Sung se fait aussitôt cette remarque quand Gabriel vient à lui raconter son histoire. Il était fils unique, enfant inespéré d'une famille de catholiques – du moins, c'est ce qu'il suppose. Et il était quasiment sûr qu'il ne se trompait pas. Quoi qu'il en soit, ce n'était nullement un jugement de valeur. Hye Sung n'avait jamais eut la foi, au même titre que ses sœurs. Il arrivait parfois à sa mère de se rendre à l'église... Mais c'était probablement plus du à des instants de désespoir et de tristesse, plus que par foi véritable. De fait, sans être ignorant des grandes lignes de la Bible, le jeune homme n'avait jamais reçu une quelconque éducation religieuse. Il ne s'en portait pas plus mal, même si sa curiosité avait été tout naturellement attisée quelques fois. Et rencontrer quelqu'un d'aussi croyant ici, ça avait quelque chose de... Bizarre, un peu ! Parce qu'à ses yeux, atterrir ici pourrait bien constituer une raison suffisante pour renier ces croyances. Mais il se doutait qu'aux yeux de son vis-à-vis, les choses devaient être bien différentes. Car après tout, il lui avait assuré : il avait remercié Dieu pour lui avoir accorder grâce jusqu'à là. Soit.

Gabriel demande à son tour à Hye Sung s'il avait des frères et sœurs. « Ouaip ! Deux grandes sœurs, des jumelles. Et une plus jeune. » répond-il simplement, omettant comme toujours de dire qu'il avait été adopté. Ça n'avait jamais eut d'importance, à ses yeux. Il ne se sentait pas moins légitime que ses sœurs au sein de la famille Choi, et on lui avait bien fait comprendre que ça n'avait jamais été le cas. Une question lui vient par la suite, parce que décidément, l'éducation de l'autre jeune homme avait de quoi l'intriguer : « Une école catho, tu dis ? C'est quoi la différence avec une école classique ? Vous avez des heures de prière, ou un truc du genre ? »

Son vis-à-vis passe ensuite du coq à l'âne, demandant à l'étudiant comment il procédait pour se nourrir. Un sourire amusé arque les lèvres du concerné... Hah, c'était bien la préoccupation de base sur l'île, ça ! « Des crustacés, des bestioles trouvées dans les bois, des baies... Avec un peu d'imagination et un estomac qui gronde, on arrive toujours à se mettre un truc sous la dent. » répond-il, les lèvres toujours doucement étirées. Quand il était arrivé ici, il ne se serait jamais douté qu'il puisse rester plus d'un jour sans se mettre quelque chose de décent sous la dent. Comme quoi, le corps humain était vraiment surprenant en temps de crise...

Leurs tours arrivés, Hye Sung et Gabriel s'approchent du préposé à courrier. Une fois son enveloppe en main, l'étudiant se décale un peu pour laisser place, les yeux rivés sur le pli, un sourire aux lèvres. Un sourire issu de la surprise, du soulagement... Et peut-être de tristesse, un peu ! Parce que même s'il était sincèrement ravi d'avoir une lettre de ses amis, le jeune homme ne pouvait pas s'empêcher d'en être vaguement chagriné : parce que forcément, un milliard de souvenirs lui revenaient soudainement.

Mais alors que Gabriel s'approche, mains vides, Hye Sung a bien vite fait de reposer son attention sur lui. Un sourire est adressé, alors que le catholique assure qu'il n'avait rien reçu. « Tu es sûr ? » demande Hye Sung, plus par rhétorique qu'autre chose. « Ils ont peut-être égaré ta lettre ? » suppose t-il, histoire de rassurer à sa manière, avant d'ajouter en secouant un peu la tête : « Tes proches ont pas pu t'oublier, quand même. » Ceci étant dit, il vient glisser son enveloppe dans sa poche, histoire de pas remuer le couteau dans la plaie.